KANBrief 3/10

Évolution plutôt que révolution

La Commission européenne et le Conseil souhaitent réformer le système européen de normalisation1 pour lui permettre à l’avenir d’être plus réactif face aux innovations, et afin de favoriser la compétitivité des entreprises. Il est prévu à cet effet que les organismes de normalisation révisent leurs modèles d’activité et adaptent davantage le système aux besoins des petites et moyennes entreprises (PME)..

En 2009, à la demande de la Commission européenne, le groupe d’experts en normalisation EXPRESS a émis un certain nombre de recommandations sur la base desquelles devrait s’amorcer la révision du système européen de normalisation. Au printemps 2010, la Commission européenne a soumis certaines options à la discussion, dans le cadre d’une consultation publique. Or, ces options vont bien au-delà des propositions du Groupe EXPRESS, ce qui a notamment provoqué de sévères critiques de la part du DIN2.

Les cercles représentés au sein de la KAN sont d'avis que le système actuel mériterait, certes, d'être optimisé, sans toutefois être remisen question par l'élaboration de structures nouvelles. C'est pourquoi la KAN s'investit, entreautres, en faveur des enjeux suivants :

  • Les actes juridiques et mesures publiques concernant la sécurité des produits ou la sécuritéet la santé au travail ne devraient pas renvoyer à des documents élaborés par des forums ou des consortiums. Les documents consortiaux (y compris ceux rédigés dans le cadre des organismes européens de normalisation) ne se prêtent pas à cet usage : les possibilités de participation y sont en effetrestreintes et ils ne reposent pas sur un consensus absolu.
  • Le financement de la normalisation ne devrait pas être soumis à des conditions telles que l’achèvement rapide des travaux. Une telle mesure ne manquerait pas en effet d’accroître excessivement la bureaucratie liée au financement. Déjà soumis à une forte pression, les comités de normalisation seraient contraints de travailler en étant encore davantage pressés par le temps. On peut craindre alors qu’une quantité accrue de résultats non mûris se trouvent fixés définitivement dans les normes. Les processus rapides sont, certes, souhaitables, mais ne doivent pas se faire aux dépens du consensus et de la qualité, ce qui pourrait avoir des conséquences inquiétantes en termes de sécurité.
  • Il ne faut pas donner l’impression que la normalisation nationale et la normalisation européenne sont contradictoires, car elles sont parfaitement complémentaires. Le travail de normalisation effectué au niveau national et le principe de délégation nationale permettent à de vastes cercles de personnes intéressées de participer au processus de normalisation, et ce dans leur langue maternelle, ce qui serait difficile autrement.
  • L’existence d’organisations de normalisation venant s’ajouter aux organismes reconnus que sont le CEN, le CENELEC et l’ETSI rendrait plus difficile la mise en pratique du principe de délégation nationale. En outre, la cohérence du système européen de normalisation se trouverait compromise si l’on voyait s’installer en Europe une situation semblable à celle qui règne en Amérique, avec une multitude d’organismes de normalisation qu’il est impossible de coordonner efficacement. C’est pourquoi, pour l’élaboration de normes destinées à soutenir les réglementations juridiques de l’UE, des appels d’offres de la Commission européenne ouvertes également à d’autres organismes ne s’avéreraient pas utiles. Ils s’accompagneraient en effet immanquablement d’une bureaucratie trop lourde.
  • Pour les cas où des organismes de normalisation auraient refusé un mandat, ou – malgré un mandat – n’auraient pas de résultats à présenter, il serait bon que la Commission européenne mette en place une procédure pour cas exceptionnels. Cette procédure devrait être légitimée dans chaque cas d’espèce, par exemple par le Comité prévu dans la directive 98/34/CE ou dans une directive spéciale.

Une question centrale de la consultation a été de savoir comment on pouvait assurer efficacement a participation des cercles intéressés au processus de normalisation. Dans leurs prises de position, le gouvernement allemand et le DIN ont évoqué le modèle de la KAN comme étant un excellent exemple de ce qui est possible sans remettre en question les  principes fondamentaux de la normalisation.

Après avoir examiné les nombreuses prises de position relatives à la consultation publique, et avoir procédé à une analyse d’impact, la Commission soumettra au Conseil et au Parlement, probablement en automne 2010, une proposition portant sur le nouveau « package » de normalisation.

Corrado Mattiuzzo  mattiuzzo@kan.de

1 Communication COM(2008) 133 final du 11 mars 2008 ; Conclusions du Conseil du 25 septembre 2008
2 DIN-Mitteilungen, mars 2010, article du Dr Bahke, Le système européen de normalisation menacé,
  www.din.de/sixcms_upload/media/2896/Beitrag-Bahke_2010-03.pdf , (en allemand)