KANBrief 2/14
Les normes harmonisées qui déclenchent la présomption de conformité1 sont élaborées sur la base d’une demande de la Commission européenne. On appelle aussi mandats ces demandes qui portent sur la rédaction de normes ou de documents apparentés à des normes. Le Règlement (UE) 1025/20122 décrit en détail la procédure à appliquer par la Commission pour passer ces demandes.
La coopération entre la Commission et le système européen de normalisation repose en premier lieu sur un programme de travail annuel et détaillé, qui inclut aussi les mandats prévus. Uniquement en cas d’urgence, la Commission peut introduire des demandes sans avoir indiqué son intention au préalable.
Les mandats, moyen de pression
En règle générale, le travail de normalisation basé sur des mandats bénéficie d’un soutien financier de la part de la Commission européenne. Ceci permet aussi d’exercer une certaine pression sur les organismes de normalisation pour que ceux-ci réalisent certains objectifs souhaités par le législateur. Les mandats contiennent en effet non seulement des critères de contenu que la norme doit respecter, mais aussi une échéance en vue de son adoption. L’un des objectifs essentiels de l’UE en termes de politique de normalisation consiste par exemple à réduire sensiblement le délai d’élaboration des normes. Une autre disposition vise à permettre à l’avenir aux parties prenantes de faire valoir plus simplement leur avis lors du travail de normalisation. Il s’agit principalement des autorités de surveillance du marché des États membres, ainsi que des organisations financées par l’UE : ANEC (consommateurs), ECOS (environnement), ETUI (syndicats) et SBS (petites et moyennes entreprises).
Participation et transparence
La Commission ne décide pas seule de l’octroi des mandats : chacun peut, par principe, la saisir de tel ou tel sujet. L’impulsion pour de nouveaux mandats provient souvent par exemple de comités sectoriels concernés par la directive en question (par exemple le comité « Machines »), d’organismes de surveillance du marché, ou encore de l’introduction d’objections formelles. Il arrive aussi que la Commission se saisisse de priorités politiques, notamment de thèmes d’actualité concernant l’environnement ou la protection des consommateurs.
Durant la phase de projet d’un mandat, la Commission doit consulter non seulement les organisations européennes de normalisation, mais aussi les parties prenantes évoquées précédemment, financées par l’UE, ainsi que – le cas échéant – le Comité sectoriel concerné. Et enfin, les États membres doivent, au terme d’une procédure d’examen, approuver les projets du mandat et la décision formelle correspondante de la Commission, au sein du Comité 1025/2012. Cette procédure d’examen est très lourde, car la question doit être soumise au Parlement et les documents doivent être traduits dans toutes les langues officielles de l’UE. C’est pourquoi la Commission doit évaluer, d’ici le 2 janvier 2015, le temps nécessaire à l’octroi de mandats de normalisation. Elle pourrait alors soumettre au Parlement et au Conseil une proposition visant à modifier ce point du Règlement, afin de simplifier la procédure.
Il est intéressant de noter que, en l’absence d’un comité regroupant des experts d’un secteur donné, la Commission doit procéder à une consultation publique, à laquelle chacun peut participer. Sur le site web de la Commission, les personnes intéressées peuvent, par un fil RSS, se tenir au courant des informations et documents d’actualité et envoyer des commentaires au point de contact de la Commission concerné. Tous les mandats peuvent être consultés sur une base de données3. On trouvera également divers documents de référence sur la politique de normalisation et le rôle de la normalisation, notamment le Vademecum de la normalisation européenne.
Une procédure qui devra faire ses preuves
Alors que la transparence de la procédure et la possibilité pour les parties prenantes d’y participer constituent une approche très prometteuse, les effets négatifs de la pression temporelle croissante exercée sur la procédure de normalisation devraient bientôt se faire sentir. Comme la KAN l’avait signalé lors de la phase d’élaboration du règlement4, les comités de normalisation travaillent déjà sous une forte pression en termes de délais. On peut alors craindre l’apparition dans les normes d’une quantité croissante de résultats non mûris, ce qui pourrait avoir des conséquences préoccupantes pour la sécurité. Du point de vue de la KAN, il faudra donc que la nouvelle procédure fasse d’abord ses preuves et soit rectifiée si cela s’avère nécessaire.
Corrado Mattiuzzo
mattiuzzo@kan.de
1 KANBrief 1/10 « Présomption de conformité : attention ! »
2 Règlement (UE) N° 1025/2012 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relatif à la normalisation européenne [...]
3 http://ec.europa.eu/enterprise/standards_policy/mandates/database
4 KANBrief 4/12 « Un coup de jeune pour le système de normalisation européen »