Les exigences de mesure dans les normes de produits

Comme l’affirme un dicton, « qui trop mesure, mesure n’importe quoi ». Et de fait, il arrive constamment que, pour une même grandeur physique, on obtienne des résultats de mesure différents. Une étude effectuée à la demande de la KAN¹ a donc examiné si les normes harmonisées et projets de normes concrétisant les directives Machines et EPI contenaient des exigences de sécurité décrites par des grandeurs de mesure, et si, lorsque c’était nécessaire, ils indiquaient les méthodes de mesurage adéquates.

Pour les mêmes mesures effectuées par différents laboratoires, on arrive facilement à des écarts de 40 à
50 %², lorsqu’il s’agit par exemple de déterminer l’exposition aux vibrations de machines guidées à la main selon la directive Machines. Dans cet exemple précis, les écarts importants ne sont pas tant imputables à la technique de mesurage qu’au choix de la manière et de l’endroit de connexion du capteur de vibrations. Autre grand facteur d’influence : les opérateurs des machines, leur manière de travailler et la force qu’ils exercent en les utilisant, ainsi que l’expérience et les connaissances théoriques du personnel en charge des mesures. Pour pouvoir comparer des mesures relevées, il est donc impératif que les normes décrivent avec précision la méthode de mesurage à utiliser.

Méthodologie de l’étude

En amont de l’étude, il a été défini quelles données des normes ne seraient pas prises en compte dans l’analyse : les définitions ou explications de termes, les grandeurs devant être calculées, ainsi que les données qui décrivent un appareillage de mesure. Parallèlement, il a été défini quelles grandeurs pouvaient faire l’objet de mesures triviales (ne nécessitant donc pas impérativement de description des méthodes de mesurage). Un exemple : pour des grandeurs telles que la température ambiante (en °C) ou la longueur (en mm ou en m), on peut partir du principe que le mesurage ne présente aucun problème, tant qu’on n’exige pas une trop grande exactitude.

Les résultats en bref

• L’étude a porté au total sur 941 normes et projets de normes issus des 54 Comités techniques (TC) du CEN et du CENELEC en charge des machines et des EPI.
• Dans les normes examinées, il est demandé près de 2.100 fois que soit prise une dimension (distance, longueur, largeur, etc.), et environ un millier de fois que soient mesurés respectivement le niveau de pression acoustique (niveau de puissance sonore et niveau de pression acoustique d’émission), ou la force et le temps (notamment la durée).
• On peut toutefois dire que, en règle générale, le mesurage de la plupart des dimensions et grandeurs de temps est de nature triviale. En revanche, le mesurage des forces, par exemple, mais plus particulièrement celui de la pression acoustique et des vibrations, nécessite une description détaillée de la méthode à utiliser.
• Il est ressorti de l’analyse des normes que, dans de nombreux cas, les méthodes de mesurage adaptées aux grandeurs à déterminer n’étaient pas indiquées, ou qu’il n’était pas fait référence aux normes adéquates. C’est par exemple le cas pour la force portante, la vitesse du vent ou l’énergie. Cette lacune est particulièrement grave pour les grandeurs que sont la force (45 % des cas) et la vitesse (32 %), qui doivent être très fréquemment mesurées, ainsi que pour les vibrations, grandeur pour laquelle la directive Machines exige que soit indiquées non seulement la valeur d’émission, mais aussi l’incertitude de mesure.

C’est pourquoi il serait bon que, se basant sur l’étude, les instances de normalisation concernées examinent toutes les exigences de mesure non triviales pour lesquelles aucune méthode de mesurage (ou aucune méthode adéquate) – n’est décrite ni ne fait l’objet d’une référence. Il serait souhaitable à ce propos que les méthodes de mesurage adéquates soient complétées, ou bien qu’il y soit fait référence, partout où cela s’avérera nécessaire.

La KAN, aidée en cela par l’exécuteur du projet, a en outre l’intention d’élaborer des recommandations sur la manière de formuler de manière appropriée les exigences de mesure dans les normes de produit. Ceci doit se faire en prenant en compte les résultats du premier volet du projet, et en se basant sur des règles de normalisation éventuellement existantes, par exemple dans des directives ISO/CEI, le règlement intérieur du CEN/CENELEC ou la série de normes DIN 820. Il conviendra, en particulier, de répondre aux questions suivantes :

1. Dans quels cas faut-il décrire la méthode de mesurage ?
2. Comment une méthode de mesurage doitelle être décrite ?
3. Comment peut-on prendre en compte judicieusement l’incertitude de mesure ?

Stephan Riedel, Frank Gillmeister

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